lundi 8 décembre 2014

Saigon,ses fatiguantes trépidations


Le parti est omniprésent à la ville comme à la campagne.
Au sud, l'église est présente dans le moindre village au point où l'état s'en inquiète, tant il a  l'exemple de la Pologne  en tête.

PK, mon voisin de chambrée, me demande si je veux bien accompagner une troupe de danseurs et chanteurs K’Ho qui vont se produire à Saïgon dans le but de récolter des fonds pour le diocèse de Dateh : je sens qu’il lui ferait plaisir d’avoir une « caution occidentale » et j’accepte car je me suis attaché à leur gentillesse : cela me fera également une occasion de visiter Saïgon.
Et puis, j’en profiterai pour rencontrer en vrai le candidat au poste de responsable technique et remonter avec mon interprète, deux personnes avec lesquels je n’ai eu des entretiens que par Skype.

Les K'ho ont une peau plus sombre que les viets.

Après la photo traditionnelle de départ, nous partons à 6 heures en bus affrété rien que pour nous, 20 places pour ………………20 passagers : royal au bar ! Donc, un voyage de 5 heures, sympathique et confortable qui nous amène directement dans à la mission catholique de Saïgon.
Située dans le premier district, soit le centre ville, cette mission  comporte plusieurs bâtiments de très grandes capacités.
C’est vraiment très grand et je me demande comment les catholiques ont fait pour ne pas se la faire piquer par les communistes. Une autre interrogation me vient à l’esprit : d’où vient tout cet argent non seulement pour l’entretien, mais encore pour construire toutes ces églises modernes que j’ai vues tout au long du voyage. J’ai quelque mal à croire que c’est uniquement la générosité des fidèles, comme me l’avait dit PH, mais il y a des mystères qu’il vaut mieux ne pas dévoiler.

Bref, à notre arrivée, la troupe va prendre ses quartiers dans une grande pièce commune, PK disparait et on me conduit dans une grande chambre sans fenêtre, triste comme une cellule de moine, avec des crucifix sur tous les murs : il y a néanmoins tout le confort avec un matelas de pénitence et le WiFi dont le mot de passe : « magnificat » m’a fait mourir de rire, je me demande pourquoi un petit rigolo n’a pas introduit striptease ou bigtits.

Bon allez, le temps de défaire ma valise et il faut rejoindre le groupe pour le déjeuner.


 Le chanteur annonce que c’est son anniversaire et il sort une bouteille de ………………….Moët et Chandon. Comment et où l’a-t-il trouvé ? Et à quel prix ? Il y a des mystères plus profonds encore que le financement de l’église au Vietnam. Toujours est-il qu’il l’ouvre lui-même, nous en verse un verre et nous buvons ce liquide tiédasse sous 35 ° à l’ombre. Pardonnez ce pêcher, Dieu des Champagne !
Du vrai Moët & Chandon, vous vous rendez compte !

Le spectacle commence à 20 heures pétantes dans une grande salle qui peut contenir une trois centaines de personnes. On m’installe parmi les VIP, juste derrière le cardinal que je n’avais pas reconnu sans son bonnet rouge.
L'hymne national est chanté debout, la main sur le cœur, par l'ensemble des spectateurs.

Le programme est alléchant, jugez-en plutôt.

le spectacle commence par  les Pom pom girls de l’énergique troupe Nam Long &  nhom mùa ABC qui interprète Hung Vuong Dung Nuoc, dont le lecteur peut voir un (trop) court extrait.

Vient ensuite le groupe de tambour Khoe vi nuoc &  Trong Com qui joue à la perfection Duy Hoàn & Ca Trùng Duong. : à ne pas louper !
Puis, Les Montagnards Hop xuong  Dan ca Bac Trung Nam interprètent brillamment Dùc Toàn & Ca doàn Vuot Quat Gong & Tay Nguyen; inoubliable !
Vient,  ensuite, la troupe internationalement connue Tuan Khôi & nhom kich Idecaf qui joue Bên giéng Giacop avec tant de vérité.
Enfin, le spectacle se termine par l’inénarrable œuvre majeure Chuyên nguoi dàn bà 2000 nam truoc, magistralement interprétée par Nhom mùa Gx. Chau Binh.

J’ai tenu stoïquement les deux heures qu’a duré le spectacle et une telle qualité d’interprétation  m’a littéralement épuisé: la troupe  de montagnards m’invite à boire un pot dans leur chambrée, c’est sympa : deux d'entre eux parlent anglais, ce qui aide dans la conversation, ils me décrivent leur quotidien dans les champs de caféiers au dessus de Dalat. Très instructif.

On se couche tôt, car la troupe doit être à 5 heures du matin à la cathédrale pour vendre leur CD à la sortie de la messe dite par PK.

J’arrive pendant la messe des étrangers, plus tardive, bien sûr ; c’est là que je suis attendu pour aider à vendre les CD enregistré par les K’Hos. 30 000 Dôngs (1,2 €), pas cher. C’est mon argument de vente, et j’amène les longs nez au stand tenu par Lena. Le monde entier est représenté : Néozélandais, Américains, européens ça marche assez bien. A la fin de la messe, la cathédrale ferme ses portes.






Je décide de quitter la mission catholique pour m’installer plus au centre, dans un hôtel du quartier des routards et je pars à la découverte de Saïgon.
Au moment où je vais payer le taxi, je sens une main qui se saisit de mon portefeuille : par réflexe, ma main le serre plus fort et la tentative de vol échoue. Tout se passe très vite, je me retourne et je vois un homme qui s’enfuit : j’essaie un mawashi geri retourné, mais mon dernier datant de 30 ans, c’est plus marrant qu’efficace ! Je lui cours néanmoins  après en hurlant, mais il saute sur la moto de son complice et ils disparaissent dans la circulation. On m’avait prévenu : ne rien laisser apparaitre au risque d’un vol à l’arraché.
HCMV est une énorme agglomération d’au moins 8 millions d’habitants  sans compter les 2 millions de migrants des campagnes. La circulation est intense où tous les coups sont permis ! Les conducteurs n'ont ni Dieu, ni maître et doivent penser que les marques sur la chaussée sont du street’art ! Il y a significativement  plus de voitures qu’à Dateh dont aucune française (pas fous, les vietnamiens), mais les camions et, surtout, les deux roues restent largement majoritaires. Ceux-ci doivent avoir une règle d’or qui consiste à ne jamais mettre pied à terre, car la circulation est permanente.

La traversée de la chaussée relève donc d’une épreuve militaro-sportive : comme pendant un défilé militaire,  il faut avancer la tête tournée à gauche et au fur et à mesure qu’on s’approche de l’axe centrale de la rue la tête se tourne progressivement à droite pour voir l’ennemi arriver de l’autre côté. S’arrêter serait une erreur grossière, courir, un risque déraisonné, faire demi tour, un suicide.

La ville offre peu d’attraits : en effet, son histoire est relativement récente, de la colonisation française. Donc, les monuments les plus anciens datent du 19ième siècle, dont la cathédrale construite avec des briques directement importées de Toulouse (Ô, Toulououououse !), la poste influencée par Eiffel, le reste n’est qu’un architecture hétérogène, où les petites maisons mal entretenues côtoient les immeubles super modernes, où la pauvreté côtoie la richesse, où la tradition se mélange à l'occidentalisation. En fait, les connexions électriques traduisent bien l'ambiance de la ville.



Une rue dans le District 1


La poste

Pour mes amis lecteurs socialistes, nostalgiques de l'ambiance URSS et sa propagande omniprésente, nous la retrouvons bien en vue sur les murs du centre-ville : quelques morceaux choisis dont je donne la traduction sur demande.




Marcher dans la rue est fatiguant, car les trottoirs sont encombrés par les motos qui sont garées sous la surveillance de gardiens privés, le bruit est omniprésent, l’air est chaud, humide et très pollué.



Mon séjour à HCMV  va me permettre de trouver ce qui manque à DaTeh.


Une relation de relations m’invite dans un restaurant français : bizarrement, nonobstant mon attrait pour la bonne chère, la gastronomie française ne me manque absolument pas : je n’ai pas bu un verre de vin depuis deux mois, et pourtant, je n’en commande pas. De plus, l’ambiance d’expat du lieu me met mal à l’aise, surtout lorsqu’un des convives me dit : «  alors, de retour à la civilisation ? ».
Je la toise en répondant : «  quelle civilisation ? ».
C’est que je me sens bien à Da Teh où l’accueil, l’hospitalité, la spontanéité, la curiosité, l’authenticité  des habitants est si sympathique. La superficialité des  grandes villes m’attirent de moins en moins.

Direction le marché pour m’acheter les vêtements qui me manquent : Il ne se distingue pas des autres marchés dans les autres pays du sud-est asiatique : on est agrippé, au sens propre du mot, par des vendeuses qui offrent des copies de marques dont  il faut diviser le prix proposé par 3, au moins.







Il y a des restaurants dans ce marché couvert : je ne résiste pas à l’envie de manger des fruits de mer : il y en a plein que je ne connais pas et je ne risque pas grand ‘chose, ils sont cuits.





Ensuite, un coiffeur : le premier est occupé avec un handicapé, le second offre des sièges d’attente trop fragile pour ma constitution (la seule fois où je me suis assis sur ces sièges, les 4 pieds, dans une simultanéité touchante, ont fait un grand écart), force m’a été de choisir un autre tout aussi accueillant.






Et maintenant, un massage honnête et professionnel : ils sont légion dans le quartier des routards. Influencé par son nom, mon choix se porte sur le Kaka Spa, cela ne doit pas être de la merde, surtout qu’il m’est proposé par une de ses meilleures représentantes, qui vous salue.


Massage im-péc-cable : douceur, efficacité, relaxation, hygiène du lieu, tout cela pour 10€.

 J’en ressors rasséréné et léger, tout va bien si ce n’est le ventre qui s’est mis à gargouiller bizarrement : il est temps de rentrer à l’hôtel.





Bien m’en a pris, car je me suis vidé les intestins toute la nuit, un vrai nettoyage en profondeur : au petit matin, j’étais prêt pour une coloscopie, même avec Jacques Chancel, mais pas pour un retour en bus  à DaTeh avec Hao, mon nouvel interprète !

Sa première mission est donc de me trouver du Smecta et de l’imodium dare-dare et le voyage est reporté au lendemain. Je passe la journée enfermé dans ma chambre d’hôtel, maudissant les nombreuses ruptures de la chaine du froid des fruits de mer….de.
Le lendemain, bourré d'imodium et de Smecta,  je paie mon hôtel près de 2 millions VND: c'est la première fois que je fais une carte bleue d'un tel montant. Il faut avouer qu'au bout de 40 ans de socialisme, tous les vietnamiens sont millionnaires : en France, il nous reste que 37,5 ans à attendre, patience, donc.

Hao suggère de revenir en faisant un changement de bus à Ma Da Gui, pour éviter la longue collecte des clients dans Saïgon.
Faisons confiance, il connait les lieux mieux que moi. Son histoire personnelle  est émouvante. Il a quitté le Vietnam à 14 ans en 1978 avec ses parents après qu’ils aient été dépossédés de leur commerce par le pouvoir socialiste qui les a considérés comme d’affreux capitalistes bourgeois et réactionnaires. Ils ont tout perdu et sont partis une main devant, une main derrière en France où sa sœur faisait des études.
Il a donc repris sa scolarité dans la région parisienne où il a appris à parler français qu’il maîtrise maintenant parfaitement. Il y a quelques années, il est revenu s’installer au Vietnam pour la filiale locale de Cap Gemini, et pour une raison personnelle que j’ignore.

Le bus évite les immenses embouteillages de la périphérie de Saigon et nous traversons d’immenses forêts d’Hévéa qui fournit ce latex si nécessaire à nous protéger !!!!


Je suis content de retrouver le calme et la sérénité de DaTeh, en dépit de notre confort spartiate, mais suffisant.



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