samedi 25 octobre 2014

Dalat, un bain de fraîcheur mérité.


Certains m’écrivent pour me demander en quoi consiste ma mission, ce qui signifie que d’autres s'interrogent aussi voire, répondent à cette question par eux-mêmes. Pour être concis,
Je mets en place des outils de management professionnels afin de donner toutes les chances de réussite au beau projet décrit sur le site https://projetdanha2014.wordpress.com,  à des acteurs engagés mais inexpérimentés en matière de management de projet.
Le but de ce blog est de partager les impressions ressenties au Vietnam, les moyens de se faire comprendre et intégrer par une population et chaleureuse. Mes péripéties purement professionnelles  sont réservées au comité de direction. Mon bureau est situé ………………..dans ma chambre, puisqu’il n’y a pas de connexion internet à DaNha, et je fais régulièrement la navette.

Mes activités m’obligent à aller rendre visite à Caritas DaLat.

J’attends notre bus devant l’église avec mon pansement et PH, lorsqu’il remarque que ma valise ne comporte pas de cadenas : affolement général, le vicaire est chargé d’en trouver séance tenante et on m’explique qu’il y a plein de voleurs et que mon attitude est pour le moins désinvolte. C’est fou ce paradoxe: même dans la mission paroissiale,  tout le monde ferme à clé la porte de son logement, de solides cadenas interdisent l’accès à la réserve de nourriture dont seul Marie a la clé.
N’y aura-t-il pas de la paranoïa, puisque tout le monde laisse son casque sur leur scoot ?

Bref, le cadenas est trouvé juste avant l’arrivée  du bus

Dalat est situé à 170 km de Da Teh, soit 3,5h de bus environ, que l’on parcourt dans un minibus de 15 places 32 personnes prennent place.



Nous avons la chance de nous installer sur la banquette  derrière le chauffeur. Il roule à tombeau ouvert, même en traversant les nombreux villages, et klaxonne à tout va, autant pour avertir de son arrivée, que pour prendre des passagers sur la route. Peu lui chaut, il est sous la protection de la vierge ! Pas étonnant cependant qu'on dénombre plus de 10 000 morts sur les routes chaque année :et, comme, le Vietnam est largement moins équipé en véhicules individuels que la France, on s'imagine aisément le carnage. Je vais éviter de rouler la nuit, donc.
Le chauffeur passe un CD de musique de grands tubes internationaux tels que "guatanamera" ou "que sera" et se croit obligé de mettre le son au maximum. Bloqué de toutes parts, je n'ai rien d 'autre à faire que d'observer et de penser : je me rends compte qu'il n'y a pas la danse des Tongs, pourtant bien adaptée à l'environnement ; il va falloir y remédier. Le passager contre la vitre a réussi à s'endormir, nonobstant le bruit, les chaos, et la chaleur, car il n'y a pas la clim dans ce minibus.
A mi-chemin, le chauffeur me lance un regard noir dans lequel je lis qu’à ma place il aurait pu prendre 3 vietnamiens moyens !!! Le bus est en effet bondé, les gens sont assis les uns sur les autres. Le bus sert également de transport de marchandises qui se mettent comme elles  peuvent sous et entre les sièges, de facteur car il s’arrête pour prendre et redistribuer le courrier au bord de la route, bref il optimise son véhicule. Les surcharges récurrentes et l’état des routes se sont définitivement fâchés avec les amortisseurs. J’arrive moulu à Dalat, à une dénivellation positive de 1300 m, mais pour 4 € le trajet, on ne va d’autant moins se plaindre qu’il n’y a pas d’autres solutions.


Da Lat signifie en en K’Ho « la source des Lats », très ancienne ethnie, qui s’est fait remarquer pendant la guerre pour ses coups fulgurants  (les fameux coups de Lats).

Cette ville a été créée à la fin du 19ième siècle par le Dr Yersin, découvreur du bacille de la rage, dont un de ses descendants, Boris -une véritable peste -  a dirigé la Russie un siècle plus tard.
Dalat fut  un lieu de villégiature particulièrement prisé des les colons français pour son climat  tempéré, qui en font le « Paris vietnamien ».
Il y a même une (petite) tour Eiffel en guise de relais de télévision.

Sur les hauteurs, au milieu de forêts de pins, les riches villas aux styles architecturaux français variés ont été conservées. Depuis 1975, les communistes, enfin, les plus riches d’entre eux, ont  continué à construire de volumineuses maisons, dont l’architecture a été plus influencée par le style soviétique.
DaLat compte près de 200 000 habitants, et devenu véritable poumon maraîcher du pays. Les fruits, les légumes, les fleurs abondent. Les fraises, les mangoustans et autres ramboutans s'offrent à nos palais royaux. Il y a même du vin que je n'ai pas goûté.
La terre est riche, chaude, ocre et tranche avec cette verdure luxuriante.
Les théiers et les caféiers recouvrent les flancs des montagnes à perte de vue tout autour.

Non seulement je découvre un café d’un goût délicieux, mais également, que le Vietnam en est le deuxième producteur au monde derrière le Brésil. Grand’mère n’a qu’à bien se tenir !!!

Avant que le soleil ne chauffe l’atmosphère, la température est relativement fraîche et revigorante, aux environs de 20° C.
Mon  pansement est littéralement frigorifié nonobstant ses gants de laine, sa grosse écharpe et son blouson, même lorsqu’il se blottit derrière moi sur la moto que Caritas nous a prêtée. Nous sommes logés dans ce centre paroissial, construit depuis à peine 10 ans sur les hauteurs, à 5 km du centre ville. La vue est splendide et le centre se compose de plusieurs bâtiments imposant. Chacun de nous se voit installé dans un dortoir, aux lits aussi durs qu’à DaTeh (de ce jour).


Il y a des douches avec des mitigeurs, le luxe !!

Je souhaite profiter de ce séjour pour trouver ce qu’il n’y a pas à Dateh et choisir les restaurants : car, à Dateh (d’hier), même s’ils sont copieux, variés, goûtus, les menus sont subis, alors je souhaite qu’ils soient choisis (tiens, cela me rappelle quelque chose !).        

En dépit de ses 4 visites à Dalat dans le cadre de ses études de guide, mon pansement est incapable de me recommander un restaurant : ce garçon a vraiment les deux pieds dans la même tong !

La circulation en ville est infiniment plus dense qu’à Dateh, mais tout se passe bien, bien mieux que les vitesses de la moto.

Le monde est vraiment petit ! Par l’intermédiaire du vicaire de Dateh, je rencontre un homme qui a étudié jadis à l’université catholique de Dalat et connait un de mes amis, un grand diplomate, qui commença sa brillante carrière par y enseigner jusqu’en 1975 avant d’être chassé par les communistes.

Bref, cet Antoine, un Lat pure souche, veut absolument que je déjeune chez lui,le dimanche et vient me chercher à 9 heures pétantes, après la messe.
C’est gentil chez lui, je suis présenté à toute la famille ou presque (il a eu 12 enfants, 9 sont encore vivants) et nous déjeunons le cul sur la table : l’image est un peu directe certes, mais en fait, deux nattes sont étendues sur le sol et nous mangeons dessus. En Europe, on mange sur des nappes, ici, c’est sur des nattes ! Eux sont habitués, pas moi. 5 minutes après m’être assis en tailleur comme tout le monde, mes tendons forcent au point que je dois changer souvent de positions et, dans leur grande générosité, on m’offre un tabouret. On discute du passé, beaucoup du passé,

L’Antoine confond quelques fois les dongs et les piastres. Il m’explique que les communistes ont saisi toutes les propriétés catholiques à Dalat, en expulsant leurs propriétaires. Tous les vietnamiens ayant eu des relations professionnelles ou personnelles avec les français ou les américains sont interdits de poste dans l’administration ainsi que leurs enfants : et comme, dans ce pays socialiste, l’administration est toute puissante, il a dû partir dans la montagne pour travailler la terre alors qu’il avait une formation d’ingénieur. Il parle 4 langues, le français, l’anglais le K’Ho et le vietnamien.

J’évite les danses folkloriques et retourne tout seul à Dalat pour m’occuper de moi.

Je pars d’abord à la recherche d’un coiffeur et entre au hasard en centre ville dans un « salon », vide de client. Salon est vite dit, il est à peine moins vétuste que ceux de Dateh. Reste maintenant à se faire comprendre de la coiffeuse qui ne parle pas un traitre mot de français, d'anglais, de polonais, d'espagnol, d'allemand, de mandarin. Allons-y donc pour le langage des signes ! A chaque question, je réponds oui, au contraire des femmes, car je suis un homme positif et je ne risque pas grand-chose, ……………………………avant de voir ses outils de travail.
Là – me dis-je in petto – si elle me coupe, c’est le tétanos garanti, plus toutes les autre bactéries que portent ses outils. J’adopte l'immobilité d'une statue pendant la coupe, ne bougeant aucun muscle du haut du corps, entrant dans une profonde méditation, pendant qu’elle s’escrime sur mon cuir (de moins en moins) chevelu. Une demi-heure plus tard, je ressors des cheveux en moins, les autres pas trop mal coupés, surtout pour la modique somme de 2€.

J’entre chez une manucure dont le niveau de langue étrangère égale celui de sa collègue coiffeuse. Elles sont deux, une pour les pieds, l’autre pour les mains. La bassine des mains n’a posé aucune difficulté, il en a été autrement pour  celle pour des pieds : elle n’en avait d’assez grande pour contenir mon pied et les deux nanas étaient pliées de rire de voir mes orteils seuls tremper tandis que le talon reposait sur le bord de la bassine. Tout se passe bien en définitive, je m’acquitte de 2 € et maintenant le massage !!!



Deux salons de massage côte à côte attirent ma curiosité : l’un affiche fièrement le prix de 50 000 dongs et l’autre une vitrine riche et luxueuse. Je jette un coup d’œil au premier et me convainc vite que c’est un prix d’appel pour des prestations supplémentaires que la morale chrétienne, féministe et bourgeoise réprouve. Probablement influencé par mon environnement ecclésiastique, je pense que Satan l’habite et me tourne vers le second.
Il est  infiniment plus classe et  offre un massage aromatique pour 5 fois plus cher : au diable les varices,  et voilà qu’une masseuse tout de blanc sagement vêtue m’invite à chausser des tongs et à la suivre dans la salle de massage où trône une table, la lumière est tamisée et il est vrai que cela sent bon.
Par gestes, elle m’invite à me déshabiller et quand je commence à retirer le dernier rempart de ma virilité elle pousse un cri d’effroi en or frais, ou l’inverse un cri d’orfraie effrayant en me demandant de remballer cette marchandise qu’elle ne saurait voir.
C’est donc en caleçon qu’elle me masse. Pas elle en caleçon, moi. Quand à elle, elle se met un masque chirurgical sur le nez et la bouche, comme si elle craignait quelques insidieuses flatulences inopportunes. Ces circonstances pour le moins bizarres s’estompent vite et je me détends l’esprit et le corps.

Sur mon expérience récente au Laos et en Thaïlande, j’avais amené peu de vêtement me disant que je trouverai tout sur place. Grave erreur, il n’y a rien à ma taille à Dateh (de demain) et je profite du gros marché de Dalat pour aller me rhabiller. Grosse déception, rien n’est à ma taille, rien du tout, générant un problème de logistique vestimentaire. J’ai remarqué quelques ateliers de tailleurs à Dateh (?), le problème sera de  me faire comprendre.

Le lendemain, la directrice de Caritas m’invite à diner avec son équipe au restaurant, qu’elle choisit. C’est bruyant, très bruyant, coloré et sympathique et la carte est très fournie. Elle me demande si je mange de l’utérus de porc qui est excellent ici en salade.
Pris au dépourvu, je lui réponds oui, mais uniquement avec du pénis d’âne ou de cheval à la limite, parce que cela se marrie bien. Je continue en disant que je préfère nettement l’utérus de souris, dont le goût est plus fin et délicat.
Mon pansement m’informe qu’une des plus savoureuses spécialités vietnamiennes est le "caneton couvé". Et, le bougre de m’expliquer que l’on prépare un bouillon avec des légumes  on prend les poussins encore dans leur coquille, les sort et on les jette vivant dans ce bouillon. C’est plein de testostérone et très bon pour les hommes, ajoute-t-il. Bon allez, demain on se lève tôt car on rentre à Dateh (règles ?).


Le bus vient nous chercher à 6h30 : il est plus confortable que le premier, plus spacieux et doit compter une trentaine de places.
Il est vide, mais pour d’obscures raisons, le chauffeur ne nous permet pas de nous mettre aux places de devant. Nous partons directement chercher des vétérans de la guerre du Vietnam, en congrès à Dalat. Leur visage, marqué par l'âge et les épreuves qu'ils ont traversées, est creusé, émacié et toujours souriant. En dépit de leur âge plus qu’avancé, ils se ruent dans le bus comme s’ils attaquaient la colline de Dien Bien Phû. Naturellement, il y a plus de passagers que de places assises et le contrôleur, sans se démonter, sort les tabourets rouge empilés dans un coin du bus pour les coincer dans l’allée centrale à chaque rangée sur lesquels s’assoit le reste des passagers en avançant comme ils peuvent. En voyant cela, je me dis  que si le bus pile, un des vieux est propulsé comme un obus de 115mm.




L’arrêt pipi est campagnard et gratuit, dans la nature et les femmes ne se donnent pas la peine d’aller se cacher. Tous ensemble, tous ensemble, nous urinons et faisant fi de cette différence de sexes, la loi du genre est déjà appliquée ici depuis des lustres.
Des sacs de plastiques traduisent les arrêts fréquents et le manque de respect de la nature. Ségo devrait venir y faire un tour, je l'imagine bien se soulager au milieu des vietnamiens !!!






Après 4 heures de route, nous arrivons à Dateh où m’attend la première récolte de riz que je vous raconte bientôt.

1 commentaire:

  1. Bonjour Antoine,

    Je tente la zone commentaire de ton blog. Si ça fonctionne, tant mieux, sinon c'est le mail.

    A ce que je lis aujourd'hui, les découvertes continuent ! C'est le charme de l'exotisme...

    Merci en tous cas pour les précisions sur ta mission ainsi que pour le lien vers "projet danha 2014", ce n'était pas inutile.

    J'aime ton regard amusé, voire ironique mais bon enfant. Ou faut-il dire bon public ?
    A ce propos, PH = le père Ho ? juste pour l'abréviation ? Et ton "pansement", parce qu'il te colle aux... talons (j'ai failli écrire autre chose !) ?

    Dans notre vieille Europe, et plus précisément ici à Toulouse, le temps semble se rallier à la saison officielle : la température, estivale (20 - 30°) jusqu'à très récemment, a chuté d'une grosse dizaine de degrés en 3 jours. Néanmoins, le Sud-Ouest est toujours privilégié en termes de beau temps. Alors que Laura me disait ce matin que Paris et Lille ont rallié l'hiver avec brume, pluie, froid etc. C'est plus normal, mais beaucoup moins chouette. J'espère que tu as au moins un anorak, car ton retour va être brutal !

    Pour le reste, nos anciens - Insead, HEC, UBCM et les autres - vont bien et m'occupent à qui mieux mieux. J'ai mis (ou remis) en route un déjeuner mensuel depuis septembre, le frère jumeau du Dej'Roc HEC, sous le nom UBCM. Pour l'instant tout va bien, avec les compliments et encouragements de beaucoup des piliers du Dej'Roc, et c'est bien sympa. Le prochain est le dernier vendredi d'octobre, qui se trouve être le 31... on ne sera sûrement pas nombreux. Je penserai à toi car nous allons chez Zenazia. Et vive le Vietnam !
    Inutile de dire que je compte sur toi au printemps prochain pour parler de ta mission !!

    Côté Anciens, j'ai discuté récemment avec François Ricci, qui me disait être en pleine négociation avec des Polonais, et ce n'est paraît-il pas simple. Il n'est pas exclus que François tente de te contacter.

    Voilà pour aujourd'hui. Je te souhaite "all the best" avec tes compagnons de route et tout le succès nécessaire, sans douter une seconde que tout ira pour le mieux.

    Bises et à très bientôt

    Dominique


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